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CONFERENCE
DE CONSENSUS
Stratégies thérapeutiques pour les personnes
dépendantes des opiacés : place des traitements
de substitution
23 et 24 juin 2004 Lyon (École normale supérieure)
TEXTES DES RECOMMANDATIONS (version courte)
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Conférence
organisée par la Fédération Française
d'addictologie
avec la participation de l'ANAES.
L’organisation de cette conférence a été
rendue possible grâce à l’aide apportée
par :
la Direction générale de la santé, Bouchara-Recordati,
Schering-Plough.
Le Flyer N°18, nov. 2004
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Promoteur,
organisation, jury, experts |
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PROMOTEUR
:
Fédération française d’addictologie
AVEC
LA PARTICIPATION DE :
Act Up-Paris, Agence française de sécurité
sanitaire des produits de santé, AIDES, Auto-support
des usagers de drogues, Association de services publics
de soins aux toxicomanes et en alcoologie, Association des
équipes de liaison et de soins en addictologie, Association
française pour la réduction des risques, Association
nationale des intervenants en toxicomanie, Association nationale
médecine générale et conduites addictives,
Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs
salariés, Centre de documentation et de recherche
en médecine générale, Collège
national des enseignants universitaires d’addictologie,
Collège national des généralistes enseignants,
Fédération française de psychiatrie,
Mission interministérielle de lutte contre la drogue
et la toxicomanie, Observatoire français des drogues
et des toxicomanies, Ordre national des médecins,
Ordre national des pharmaciens, Réseau Toxibase,
Société d’addictologie francophone,
Société de formation thérapeutique
du généraliste, Société française
d’alcoologie, Société française
de médecine générale, Société
française de pharmacie clinique, SOS Addictions
AVEC
LE SOUTIEN :
du ministère de la Santé et de la Protection
sociale.
COMITÉ
D’ORGANISATION
A. MOREL, président : psychiatre addictologue, Boulogne,
J. BEAUVILLAIN : médecin-conseil, CNAMTS, Tourcoing,
C. BERNARD : médecin de santé publique, DGS,
Paris, P. BINDER : médecin généraliste,
Lussant, A. CADET-TAÏROU : médecin de santé
publique, OFDT, Saint-Denis, D.
CHOLLEY : médecin-conseil, CNAMTS, Strasbourg, P.
DOSQUET : méthodologie Anaes, Saint-Denis La Plaine,
J-D. FAVRE : psychiatre, Clamart, C. GATIGNOL : pharmacien,
Afssaps, Saint-Denis, D. GRUNWALD : Conseil national de
l’ordre des médecins, Paris, J. HARBONNIER
: psychiatre, Lille, Y. HEMERY : psychiatre, Morlaix, J.
LAMARCHE : pharmacien, Paris, W. LOWENSTEIN : addictologue,
Boulogne, F.OLIVET : Auto-support des usagers de drogues,
Paris, C. PAINDAVOINE : méthodologie Anaes, Saint-Denis
La Plaine, P. POLOMENI : addictologue, Marseille, M. REYNAUD
: psychiatre, Villejuif, M. RICATTE : pharmacien conseil,
CNAMTS, Paris, O. ROMAIN : éducateur, Metz, J-L.
SAN MARCO : médecin de santé publique, Marseille,
T. SHOJAEI-BROSSEAU : méthodologie Anaes, Saint-Denis
La Plaine, D. TOUZEAU : psychiatre, Bagneux
GROUPE
BIBLIOGRAPHIQUE
B. BADIN de MONTJOYE : psychiatre, Paris, A. BENYAMINA :
psychiatre addictologue, Villejuif, P. BONTHILLON-HEITZMANN
: médecin généraliste, Paris, L. FOURNIER
: infectiologue, coordinatrice de réseau ville-hôpital,
Melun, M. JAUFFRET-ROUSTIDE : sociologue, Saint-Maurice,
L. JOSEPH : médecin généraliste, Melun,
M. LUKASIEWICZ : psychiatre addictologue, Villejuif, S.
MAHIER : médecin généraliste, Provins,
O. PHAN : psychiatre, Paris, T. ROUAULT : directeur du réseau
Toxibase, Lyon, D. VELEA : psychiatre addictologue, Paris
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JURY
J-L. SAN MARCO, président : médecin de santé
publique, Marseille,
M.
BECCHIO : médecin généraliste, Villejuif,
B.
CHATIN : Conseil national de l’ordre des médecins,
Paris,
C.
DEBOCK : enseignante en sciences de l’éducation,
Créteil,
R. DEMEULEMEESTER : médecin de santé publique,
Saint-Denis,
C.
GILLET : tabacologue et alcoologue, Nancy,
J-B.
GUIARD-SCHMID : infectiologue, Paris,
F.
HARAMBURU : pharmacologue, Bordeaux,
M-P.
HOURCADE : magistrat, Paris,
M.
KREUTER : journaliste médical, Paris,
A.
LALANDE : Act Up-Paris, Paris,
S.
LE GALL : médecin du travail, La Rochelle,
C.
MOREL : pharmacien, Arras,
F.
RANDON : médecin-conseil, CNAMTS, Lyon,
A.
RIGAUD : psychiatre, psychanalyste, alcoologue, Reims,
M.
TOBELEM : médecin généraliste, Paris
EXPERTS
M. AURIACOMBE : psychiatre addictologue, Bordeaux,
P.
BEAUVERIE : pharmacien hospitalier, Villejuif,
D.
BRY : addictologue, Avignon,
C.
CALDERON : AIDES, Pantin,
A.
COPPEL : sociologue, Paris,
J-M.
COSTES : démographe, directeur de l’OFDT, Saint-Denis,
J-P. COUTERON : psychologue, Mantes-la-Jolie, S. DALLY :
toxicologue, Paris,
J-P. DAULOUEDE : psychiatre addictologue, Bayonne,
J-J.
DEGLON : psychiatre, Chêne-Bougeries,
J-M.
DELILE : psychiatre addictologue, Bordeaux,
D.
DEPINOY : médecin généraliste, Reims,
J-F.
FAVATIER : Auto-support des usagers de drogues, Nîmes,
B. FONTAINE : médecin du travail, Lille,
P.
GOISSET : addictologue, Montreuil,
A.
GUICHARD : chercheur, Inserm, Saint-Maurice,
F.
HERVE : psychologue, ANIT, Villeneuve-la-Garenne,
E.
KAMMERER : addictologue, Mulhouse,
P.
KOPP : économiste, Paris,
X.
LAQUEILLE : psychiatre, Paris,
B.
LEBEAU : addictologue, Bagnolet,
C.
LEJEUNE : néonatologiste, Colombes,
J-P.
LHOMME : médecin généraliste, directeur
de CSST, Paris,
M. MALLARET : pharmacologue, Grenoble,
L.
MICHEL : psychiatre, Bois-d’Arcy,
I.
PELC : psychiatre et médecin de santé publique,
Bruxelles,
B.
RIFF : médecin généraliste, Lille,
S.
ROBINET : pharmacien d’officine, Strasbourg,
B.
ROQUES : neuropharmacologue, Paris,
F.
SAINT-DIZIER : médecin généraliste,
Toulouse,
X.
THIRION : médecin de santé publique, Marseille,
M.
VALLEUR : psychiatre, Paris,
J.
VIGNAU : pédopsychiatre, Lille,
M.
VILLEZ : directrice de CSST, Lille,
D.
VUILLAUME : économiste de la santé, Paris,
S.
WIEVIORKA : psychiatre, Paris
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QUESTIONS
POSÉES |
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Question
1. Quels sont les finalités et les résultats
attendus des traitements de substitution des opiacés
?
Question 2. Quels sont les résultats obtenus
par les traitements de substitution des opiacés?
Question 3. Quelles sont les indications des médicaments
de substitution des opiacés ?
Question 4. Quelles sont les modalités de prise
en charge nécessaires à la mise en œuvre
et au suivi des traitements de substitution des opiacés
?
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Question
5.
Quand et comment les modalités d'un traitement de substitution
des opiacés doivent-elles être adaptées
en pratique ?
Question 6. Comment promouvoir la qualité des
pratiques professionnelles dans la prise en charge des patients
bénéficiant d'un traitement de substitution
des opiacés ?
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AVANT-PROPOS |
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Cette
conférence a été organisée et
s’est déroulée conformément aux
règles méthodologiques préconisées
par l’Anaes (Agence nationale d’accréditation
et d’évaluation en santé).
Les
conclusions et recommandations présentées
dans ce document ont été rédigées
par le jury de la conférence, en toute indépendance.
Leur teneur n’engage en aucune manière la responsabilité
de l’Anaes.
Les
personnes dépendantes des opiacés expriment
des demandes qui appellent des stratégies de prise
en charge médicale, psychologique et sociale parmi
lesquelles les médicaments de substitution aux opiacés
(MSO), méthadone et buprénorphine haut dosage
(BHD), ont une place prépondérante.
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Ils
agissent en se fixant sur les récepteurs opiacés
et nécessitent une prise en charge médicale,
psychologique et sociale par un médecin prescripteur
et d'autres professionnels. Dans le texte, les sigles TSO
(traitement de substitution des opiacés) et MSO sont
utilisés de façon distincte. Les TSO ne se limitent
pas à la prescription de MSO, mais comportent des notions
de prise en charge et d’alliance thérapeutique
avec le patient. Les TSO constituent une pratique, les MSO
ne sont que des moyens.
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Question 1. Quels
sont les finalités et les résultats attendus
des traitements
de substitution des opiacés ?
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La
finalité de l'utilisation des TSO est de permettre
aux patients de modifier leur consommation et leurs habitudes
de vie pour recouvrer une meilleure santé et une
meilleure qualité de vie.
1. LES OBJECTIFS DES PERSONNES DEPENDANTES DES OPIACES
Les objectifs des personnes dépendantes des opiacés
peuvent être selon leur parcours et leurs projets
personnels :
- soulager un état de manque douloureux ;
- assurer une gestion personnelle de la dépendance
;
- diminuer, voire cesser la consommation des opiacés
illicites en s'accommodant du maintien de la pharmacodépendance
de substitution ;
- parvenir à une abstinence complète d'opiacés,
y compris de tout MSO ;
- parvenir in fine à la résolution complète
de toute problématique de mésusage de substances
psycho-actives.
Ces objectifs et motivations sont susceptibles d'évoluer
au cours du traitement.
2. LES OBJECTIFS
DES PROFESSIONNELS DE SANTE
Les objectifs des professionnels de santé se distribuent
sur plusieurs axes :
1. la réponse à court terme à la souffrance
physique et morale, parfois dans l’urgence ;
2. la prise en charge de la dépendance aux opiacés
avec trois objectifs à court, moyen et long terme
:
- diminuer et si possible arrêter la consommation
des opiacés illicites dans une perspective de réduction
des risques en s'accommodant du maintien de la pharmacodépendance,
.
|
|
- aboutir à
une abstinence complète d'opiacés illicites
: le traitement est conçu alors comme une étape
vers le sevrage de toute substance opiacée ; il peut
cependant être nécessaire à long terme,
voire à vie,
- aboutir in fine à l'abstinence complète
de toute substance psycho-active illicite et de tout MSO,
ce qui demande une évolution personnelle, du temps
et un accompagnement
Le
partage de ces objectifs avec les patients dans le cadre
de l'élaboration du projet de soins et la question
du temps sont déterminants ;
- la prise en charge des dommages induits et des pathologies
associées infectieuses, psychiatriques et addictives
;
- la gestion de situations particulières : grossesse,
précarité, détention, situations irrégulières,
centre de rétention, etc. ;
- l'amélioration des liens sociaux, en maintenant
l’insertion et en favorisant la réinsertion
: accès à un(e) assistant(e) social(e), à
des ressources, au logement, à l’emploi, favoriser
le maintien des relations familiales et sociales.
3. LES OBJECTIFS GENERAUX ET DE SOCIETE
Les objectifs généraux et de société
se situent dans les registres de la santé publique
(réduction des risques, etc.) et du champ social
(diminution de la délinquance, etc.) et économique.
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Question 2. Quels
sont les résultats obtenus par
les traitements
de substitution des opiacés ?
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1.
UN IMPACT CLAIREMENT POSITIF
1.1. Accès au traitement de substitution
En moins de dix ans, le nombre de patients recevant un MSO
est passé de quelques dizaines à près
de 100 000.
1.2. Insertion dans un processus de soins et de réduction
des risques
Les TSO ont contribué à favoriser l’accès
aux soins et à réduire mortalité, morbidité
et dommages sociaux.
1.2.1. Mortalité et morbidité
Décès par surdoses à l’héroïne
: 5 fois moins entre 1994 et 2002. Grossesse : 3 fois moins
de prématurité. Patients « injecteurs
» : 6 fois moins entre 1995 et 2003. De 1996 à
2003, près de 3 500 vies ont été sauvées.
1.2.2. Situation sociale et insertion
Situation sociale : 50% des patients ont une meilleure situation
sociale. Infractions à la législation des
stupéfiants (ILS) concernant l’héroïne
: 3 fois moins entre 1995 et 2003
1.2.3. Point de vue des usagers
Trois patients sur 4 estiment «s’en être
sortis» ; plus de 2 sur 3 déclarent une meilleure
qualité de vie.
1.2.4. Bénéfice en termes de coûts (voir
tableau 1).
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|
2.
LIMITES
- Accès aux soins hétérogène
et inégalitaire selon les zones géographiques
en termes de choix du MSO et de nombre de médecins
prescripteurs et de pharmaciens délivrant des MSO.
-
Accès aux soins des sujets en situation précaire
faible.
- Mauvaises utilisations : injection IV et sniff de buprénorphine
; décès par surdose de méthadone ou
par potentialisation buprénorphinebenzodiazépines
(BZD), notamment chez les injecteurs de BHD ; primodépendance
à la buprénorphine.
- Marché parallèle de MSO : seulement 6 %
des consommateurs sont à l’origine de 25 %
des quantités remboursées.
- Maintien ou renforcement de consommations parallèles
(alcool, BZD, cocaïne, etc. ).
- Peu d’impact sur la contamination par le virus de
l’hépatite C.
- Persistance de la stigmatisation de la dépendance
et de la souffrance psychologique.
Tableau 1.
Variation du coût social de la consommation de
drogues en 1997, calculée en faisant l’hypothèse
que 50 % des sujets dépendants des opiacés
étaient substitués (en millions d’euros).
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1997
|
Variation due aux TSO |
1. Coûts
directs des soins
2. Coûts
directs de prévention et de recherche
3. Coûts
directs de l’application de la loi (justice, police,
gendarmerie)
4. Coûts
directs de pertes de prélèvements obligatoires
(SIDA et surdoses, incarcérations, ILS*)
5. Coûts
indirects des pertes de revenu et des pertes de production
|
231,00
143,70
498,19
498,19
1175,48
|
+ 383,00
0,00
- 328,92
- 83,17
- 566,20
|
Coût social |
2 226,49 |
- 595,28 |
|
 |
*
ILS : infraction à la législation sur les stupéfiants
|
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Question 3. Quelles
sont les indications
des médicaments
de substitution des opiacés ?
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Indication
: dépendance avérée aux opiacés.
La dépendance à d’autres substances psychoactives
(cannabis, cocaïne, etc. ) n’est pas une indication.
1. QUELQUES CARACTERISTIQUES DES MSO DISPONIBLES (tableau
2)
Méthadone : non injectable ; meilleure satisfaction
du patient, mais risque de surdose ; interactions médicamenteuses
à respecter ; gamme insuffisante (dosages et présentations).
|
|
BHD
: possibilité d’injection IV ; moindre risque
de surdose, mais moindre satisfaction du patient, avec risque
de consommations associées ; association dangereuse
BHDBZD à fortes doses, notamment en cas d’injection
de la BHD.
2. PROFIL DES
PATIENTS
Le choix de la molécule devrait pouvoir être
adapté : par exemple, la méthadone semble
plus adaptée pour les sujets injecteurs IV.
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Tableau 2. Quelques
caractéristiques spécifiques des 2 médicaments
+ : avantage ; -
: inconvénient ; SNC : système nerveux central
;
IRS : inhibiteur
de la recapture de la sérotonine
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Méthadone |
|
Buprénorphine |
Mode d’action |
|
Agoniste |
|
Agoniste/antagoniste |
Dangerosité |
- - |
Risque de
surdose mortelle
Surdosage
accidentel (enfant) |
+ |
Moindre risque de surdose (sauf interaction) |
Pharmacocinétique |
- |
Variations inter-individuelles
importantes : dosage plasmatique si
nécessaire |
+ |
Peu de variations d’un sujet à l’autre |
Satisfaction |
+ |
Meilleure satisfaction ; moins d’anxiété |
- |
Moindre satisfaction (risque de consommations associées) |
Interactions pharmacodynamiques |
- |
Les médicaments dépresseurs
respiratoires et dépresseurs du SNC* peuvent favoriser
une
dépression respiratoire
Agonistes-antagonistes
morphiniques |
- - |
Benzodiazépines (en particulier à forte
posologie) et autres médicaments dépresseurs
du SNC : risque de surdose mortelle |
Interactions
pharmacocinétiques |
- - |
- Induction enzymatique :
anticonvulsivants (carbamazépine,
phénitoïne, phénobarbital),
rifabutine, rifampicine, griséofulvine,
antirétroviraux (lopinavir, nelfinavir, ritonavir,
efavirenz, névirapine) :
risque de diminution des
concentrations plasmatiques de
méthadone.
- Inhibition enzymatique : IRS** (fluvoxamine), cimétidine
(= 800 mg/24 h) : risque de
surdosage.
- Intérêt du dosage plasmatique pour
évaluer les interactions par induction ou inhibition
enzymatique
en cas de réponse insuffisante ou
excessive au traitement. |
± |
- Inhibition enzymatique : surveillance renforcée
en cas d’association à des
antifongiques azolés (kétoconazole,
itraconazole) et des inhibiteurs des protéases
(nelfivarir, ritonavir et indinavir).
- Induction enzymatique : prudence en cas d’association
à des
anticonvulsivants (carbamazépine,
phénobarbital, phénytoïne) ou à
la rifampicine.
- Le risque d’interaction par inhibition ou induction
enzymatique est moindre
que pour la méthadone. |
Forme pharmaceutique et présentations |
-
+
-
- |
Gamme de dosages incomplète
La forme sirop ne peut être injectée
Excipients : sucre (diabétique) ; alcool (risque
avec les médicaments à effet antabuse)
Difficultés de stockage dans les
pharmacies |
+
- |
Gamme complète de dosages ;
présentation adaptée
Possibilité de mauvaise utilisation :
comprimé pouvant être injecté, sniffé
ou fumé |
Toxicité |
|
|
|
Risque d’atteinte hépatique (voie IV surtout) |
Autres |
|
|
|
Explications nécessaires pour utilisation optimale
de la voie sublinguale |
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 |
3.
CADRE REGLEMENTAIRE (tableau 3)
Méthadone : primo-prescription en centres spécialisés
de soins aux toxicomanes (CSST) ou établissement
de santé ; relais en ville possible ; prescription
: 14 jours ; délivrance 7 jours ; liste des stupéfiants.
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|
BHD
: prescription par tout médecin ; prescription : 28
jours ; délivrance : 7 jours ;
liste I (règles prescription, délivrance des
stupéfiants).
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Tableau 3. Résumé
du cadre réglementaire
|
Méthadone |
Buprénorphine |
Prescripteur initial |
CSST, établissements de santé (relais
en ville possible) |
Tout médecin |
Liste |
Stupéfiant |
Liste I (mais règles de prescription et délivrance
des stupéfiants) |
Durée de prescription |
14 jours |
28 jours |
Ordonnance |
Sécurisée |
Sécurisée |
Délivrance |
1 à 7 jours (14 jours à titre
dérogatoire) |
7 jours (28 jours à titre
dérogatoire) |
Fractionnement |
oui |
oui |
Renouvellement |
interdit |
interdit |
Chevauchement |
Si mention expresse |
Si mention expresse |
|
 |
4.
PROPOSITIONS
Il convient de :
- poursuivre le développement des TSO, en tenant
compte de leurs facteurs d’efficacité ;
- toucher plus de patients ;
- donner aux prescripteurs le choix des molécules
;
- renforcer la sécurité.
L’expérience tirée des erreurs commises
au moment du lancement de la BHD doit guider les propositions
d’amélioration :
Adaptations du dispositif actuel :
- obligation pour le médecin de contacter le pharmacien
avant prescription et d’indiquer son nom sur l’ordonnance,
- établissement de contacts fréquents entre
le médecin et le pharmacien en début de traitement
et jusqu’à obtention de la posologie d’entretien
; de même en période de déstabilisation,
- importance du travail en réseau à privilégier,
en particulier collaboration entre le
médecin de ville et le centre spécialisé,
- incitation des médecins et des pharmaciens à
se former,
- création d’au moins un CSST dans tous les
départements qui n’en disposent
pas et mise en application par tous les CSST de leur mission
d’accès au TSO,
- mobilisation des services médicaux de l’assurance
maladie pour faciliter la mise en place de protocoles personnalisés
de soins et pour repérer les situations faisant suspecter
un mésusage et prendre contact avec les médecins
et pharmaciens concernés,
|
|
-
développement des dispositifs spécifiques
en direction des populations précarisées,
afin de leur donner accès au TSO,
Propositions
de changements touchant le cadre actuel de prescription
des médicaments disponibles :
- primo-prescription de méthadone en ville. Aucun
argument ne s’oppose à cette mesure dès
lors que l’on en assure la sécurité,
- durée de prescription maximale identique pour les
deux MSO (28 jours), modalités de prescription et
de délivrance identiques, et contrôles urinaires
préconisés dans les mêmes termes,
- déclaration de prescription et centralisation des
données pour éviter les prescripteurs multiples,
en protégeant la confidentialité,
- mise à disposition de dosages faibles et élevés
de méthadone pour en faciliter l’adaptation
posologique et de conditionnements adaptés facilitant
son
stockage en pharmacie,
- mise à disposition de formes injectables des MSO,
réservées aux seuls cas d’échec
du traitement oral, avec prise sur place pendant toute la
durée du traitement, afin de limiter les risques
d’injection IV de comprimés ou de gélules,
- recherche de procédés galéniques
empêchant l’injection de comprimés ou
de gélules (association à un antagoniste,
gélifiants, etc.).
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 |
Question 4. Quelles
sont les modalités de prise en charge nécessaires
à la mise en œuvre
et au suivi des
traitements de substitution des opiacés ?
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1.
BILAN PREALABLE
Le premier contact est fondamental. Être empathique
est indispensable. Une alliance se noue entre le médecin
et le patient dès la première consultation.
Le diagnostic de dépendance aux opiacés doit
être confirmé.
La trajectoire et l’état de santé du
patient sont évalués.
2. INITIALISATION DU TRAITEMENT
Le patient est informé et le cadre de soins est précisé.
Le secret professionnel est garanti.
La prise initiale du MSO doit se faire à l’apparition
des premiers signes de manque, le médecin doit en
informer le patient.
L’arrêt le plus rapide possible de toute prise
d’opiacé illicite est recherché.
Il est nécessaire de prendre en compte les risques
d’interactions avec d’autres substances (notamment
alcool, antirétroviraux, BZD, inducteurs et inhibiteurs
enzymatiques, etc.).
Méthadone :
- dose initiale : 10 à 40 mg/j ;
- paliers d’augmentation 5 à 10 mg maximum
par paliers de 1 à 3 jours, en fonction de la clinique,
sans jamais excéder par semaine 50 % de la dose initiale
;
- prise quotidienne unique orale.
BHD :
- dose initiale : 4 mg à 8 mg/j au vu des pratiques
professionnelles (doses supérieures à celles
de l’AMM, qui justifient d’être validées
par des études cliniques spécifiques) ;
- respecter un délai de 24 heures après la
dernière prise d’opiacé pour éviter
le syndrome de manque dû aux propriétés
antagonistes de la buprénorphine ;
- paliers d’augmentation de 1 à 2 mg par paliers
de 1 à 3 jours, en fonction de la clinique, jusqu’à
la dose optimale ;
- prise quotidienne unique sublinguale.
Contrôles urinaires : pour la méthadone, la
réglementation actuelle impose une analyse d’urines
avant le début du traitement et la préconise
pour le suivi. Le cadre réglementaire gagnerait à
être homogénéisé pour les 2 MSO
: analyse d’urines recommandée, voire indispensable,
à l’initialisation du traitement pour vérifier
la présence d’opiacés, et contrôles
ultérieurs si besoin en accord avec le patient.
Le traitement initial est prescrit sur une ordonnance sécurisée,
pour 1 ou 2 jours, avec délivrance quotidienne. Le
nom du pharmacien est écrit sur l’ordonnance.
L’initialisation du traitement est le début
d’une longue collaboration médecin-pharmacien,
avec échange permanent d’informations.
|
|
3.
ADAPTATION DU TRAITEMENT
Recherche
de la posologie optimale :
- initialement par paliers de 1 à 3 jours pendant
les 10-15 premiers jours, jusqu’à suppression
des symptômes de manque ;
- puis paliers de 4 à 7 jours.
Paliers
:
- méthadone : 5 à 10 mg ;
- BHD : de 1 à 2 mg.
Posologie
de stabilisation :
- méthadone : entre 60 et 100 mg/j ;
- BHD : 8 à 16 mg/j.
Durant
cette période, le pharmacien doit être averti
des modifications du traitement et des modalités
de la délivrance. Il doit signaler en retour toute
anomalie au médecin prescripteur.
4. SUIVI DU PATIENT EN PERIODE DE STABILISATION
Il faut être vigilant vis-à-vis :
- des mauvaises utilisations du MSO ;
- d’une reprise de consommation d’héroïne
;
- de l’apparition ou de l’augmentation de la
consommation d’autres substances psycho-actives.
En l’absence d’amélioration : réévaluation
et réorientation de la prise en charge si besoin.
5. QUAND ET COMMENT ARRETER UN TSO?
La demande d’arrêt du traitement ne peut, en
dehors de circonstances exceptionnelles, venir que du patient
lui-même.
Il n’y a pas de durée optimale pour un TSO.
Le soutien des patients dans leur projet d’arrêter
un TSO est indispensable, suggérant des modalités
d’arrêt les plus efficaces et les moins douloureuses
possible.
L’expérience montre la possibilité d’arrêts
lentement dégressifs. Les modalités de diminution
sont gérées par le patient lui-même,
en fonction de ses symptômes. Il est illusoire de
fixer une durée a priori au processus de diminution
en vue de l’arrêt d’un MSO.
Aucun critère fiable ne permet de prédire
le succès ou l’échec d’une tentative
d’arrêt d’un TSO. Il existe cependant
des contextes plus favorables que d’autres (bonne
insertion, arrêt de longue date de toutes substances
non prescrites, etc.).
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 |
Question
5. Quand et comment les modalités d'un traitement de
substitution des opiacés doivent-elles être adaptées
en pratique ? |
 |
1.
COMORBIDITES SOMATIQUES
En cas d’état de manque ou d’hospitalisation,
prescrire un MSO pendant une durée courte.
Traitement antalgique en cours de TSO : AINS, augmentation
et fractionnement du MSO, voire passage temporaire à
la morphine.
L’accès au TSO favorise le dépistage
des infections virales (VIH, VHC, VHB) et l’accès
à leur traitement.
2. COMORBIDITES PSYCHIATRIQUES
Elles sont fréquentes et à rechercher systématiquement.
Les troubles de l’humeur induits par les opiacés
disparaissent au cours du 1er mois du TSO : traitement inutile.
Les diagnostics différentiels sont les état
dépressifs (traitement antidépresseur) et
les troubles de l’adaptation avec réaction
dépressive prolongée (traitement anxiolytique,
en évitant les BZD).
En cas de schizophrénie : préférer
la méthadone.
3. MAUVAISES UTILISATIONS DE LA BHD
Elles sont diverses : injection IV, sniff ; consommations
avec d’autres substances psycho-actives, dont les
BZD ; augmentation des doses ; prises fractionnées
; risque de surdose ; prescripteurs multiples (= 5) ; trafic.
Prévention : information du patient sur les conditions
d’efficacité et les risques (surdose, interactions).
Sensibilisation et information des professionnels de santé
(médecins, pharmaciens, réseau).
Implication des services médicaux de l'assurance
maladie.
4. ABUS DE MEDICAMENTS PSYCHOTROPES
La recherche d’effet de « défonce »
par les BZD est le fait d’une minorité de patients.
L’utilisation de médicaments psychotropes reste
utile chez les patients anxieux, insomniaques, etc. Il faut
rechercher systématiquement les consommations associées,
sensibiliser les patients sur les interactions avec l’alcool
ou les BZD, fractionner éventuellement la dispensation
des BZD, et éviter la prescription de flunitrazépam
et de chlorazépate dipotassique.
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5.
GROSSESSE ET TSO
La dépendance aux opiacés implique une grossesse
à risque.
Les MSO sont une excellente indication chez une femme dépendante
des opiacés, au mieux avant une grossesse désirée,
ou au 1er, voire 2e trimestres. En fin de grossesse, l’initialisation
d’un TSO est discutée.
Il n’ y a pas à modifier un TSO à la découverte
d’une grossesse, les effets des 2 MSO étant identiques.
Une prise en charge périnatale et médico-psychosociale,
prolongée en réseau villehôpital, est
nécessaire.
Le MSO ne prévient pas le risque de syndrome de sevrage
néonatal.
Le MSO doit être bien équilibré en fin
de grossesse et en post-partum : augmentation éventuelle
de posologie (en fonction des dosages plasmatiques, si besoin,
en cas de prise de méthadone).
Les MSO ne sont pas une contre-indication à l’allaitement
(sauf infection par le VIH concomitante).
6. PRISON ET GARDE A VUE
La continuité des soins dans le respect de la déontologie
et de la législation est une priorité sanitaire.
En milieu pénitentiaire, la dispensation de TSO est
le principal outil de réduction des risques d'infection
virale (VIH, VHB, VHC).
Il convient de :
- former les équipes de soins en milieu pénitentiaire
et les agents de l’administration pénitentiaire,
et d’élaborer des guides de bonnes pratiques
;
- généraliser les consultations d’addictologie
pour les détenus ;
- préparer le relais des soins en ville et la sortie
des détenus (prévention des surdoses).
Patients sous MSO en garde à vue : le médecin
doit assurer la continuité des soins et prévenir
un syndrome de sevrage.
7. POPULATIONS PRECARISEES
Aller au-devant des personnes : bus, antennes mobiles, boutiques,
réseaux de pharmaciens, etc.
Établir des règles de fonctionnement simples,
claires et précises, connues des usagers.
Rendre la dispensation flexible.
Proposer des services médicaux, psychologiques, sociaux
et juridiques.
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Question
6. Comment promouvoir la qualité des pratiques professionnelles
dans la prise en charge des patients bénéficiant
d'un traitement de substitution des opiacés ? |
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La
qualité des pratiques repose sur la relation de confiance,
l’appel au savoir de l’usager, la
prise en charge globale au long cours, avec des objectifs
élaborés et partagés. L’adaptation
des posologies pour obtenir le bien-être physique et
psychologique du patient et son
accompagnement psychologique et social constituent d’autres
éléments majeurs de la
qualité.
1. PROMOTION DE LA QUALITE DES PRATIQUES PROFESSIONNELLES
1.1. La formation
Elle doit permettre aux professionnels de santé de
:
- prendre en compte la souffrance et la détresse des
usagers de drogues ;
- acquérir l’assurance et le recul pour la gestion
d’une relation thérapeutique à long terme
;
- prendre en compte les problématiques médicales,
psychiques, relationnelles ou culturelles ;
- proposer aux patients les soins les plus appropriés
ou les adresser à des collègues plus spécialisés,
si besoin.
1.2. La recherche
Un objectif essentiel serait de permettre à la communauté
scientifique et médicale de contribuer à l’optimisation
des pratiques médicales, particulièrement en
ce qui concerne les traitements de substitution dispensés
en médecine de ville (BHD actuellement et méthadone
lorsqu’elle sera dispensée en ville).
À court terme
Quatre domaines devraient faire l’objet d’un effort
de recherche prioritaire dans les années à venir
:
- les patients traités par MSO et leurs besoins
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-
l’analyse approfondie des avantages et des dangers
du phénomène des « irréguliers
» et « intermittents » de la substitution
;
- l'analyse des obstacles psychosociologiques à une
prise en charge plus globale des patients - l’identification
des facteurs associés à la diversité
des pratiques professionnelles.
À
moyen et long terme
Trois champs de recherche doivent susciter un investissement
à long terme :
- des études de cohorte sur le devenir à long
terme des patients substitués ;
- une étude de cohorte en population générale
sur les entrées dans les consommations et les parcours
d’abus et de dépendance ;
- des études visant à mieux connaître
les effets des traitements et à permettre le développement
de nouveaux traitements.
2. L’EVALUATION
Le jury propose que :
- l’Anaes, en lien avec les professionnels concernés
et les usagers, élabore un référentiel
d’évaluation des pratiques professionnelles
concernant les TSO ;
- les comités départementaux de suivi se voient
confier un rôle d’observation des pratiques
de TSO.
3. LA COMMUNICATION
Elle doit s’attacher à :
- informer les usagers de drogue et si possible à
faire évoluer leurs comportements de consommation
et leur recours aux TSO ;
- harmoniser les pratiques professionnelles ;
- faire évoluer les représentations dans le
grand public.
Les messages, les supports et les méthodes seront
adaptés en fonction des personnes
ciblées.
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